Croire ou ne pas croire ?

Telle n'est pas la question je crois. Ou du moins pas celle qui donnera des éléments de réponses aux interrogations métaphysiques qu'on peut avoir.

Je crois que cette question traduit un curieux phénomène qui m'a frappé à de nombreuses reprises dernièrement : l'indécision. Comme si nombre de personnes n'étaient pas bien certaines de ce à quoi elles devaient occuper le moment présent, la journée ou même leur vie. Une sorte d'indétermination maladive qui laisse perplexe et immobile devant l'indécidable.

Est-ce la profusion d'informations et de possibilités qui crée cette indécision ? Est-ce de se dire qu'on a accès à tant de choses qu'on ne sait pas pour lesquelles se décider? Ou bien y-a-t-il un syndrôme plus complexe qui évide tant de personnes d'une réelle motivation et passion vitale.

Il y a quelque chose de désincarné dans cette attitude, une sorte d'insatisfaction perpétuelle devant le monde et l'existence.

Je me demande si c'est le fait d'avoir conscience de tant de choses et de se sentir si infime par rapport à l'immensité du monde qui entoure l'homme gavé d'informations. Est-ce que cet homme qui a derrière lui l'histoire de l'humanité et face à lui les prédications pessimistes des indicateurs environnementaux, sociaux et sociologiques, se sent impuissant à trouver une médiane qui puisse différer de tout ce qui a déjà été réalisé et vécu ?

A trop écouter les avis qui m'entourent, je devrais dresser une sorte de constat fataliste de ce qui doit advenir. Mais je ne suis aps d'accord, les hommes ne sont ni pire ni meilleurs qu'avant et ne le seront pas moins ni plus par la suite. Simplement ils sont hommes, contradictoires, instables, humains tout bonnement.

Etre réaliste ce n'est pas dire que l'homme rend ses propres utopies et idéaux irréalisables, qu'il se damne lui-même par ses va-et-viens, être réaliste c'est savoir admettre qu'un certain nombre de choses sont indéniables, qu'un certain nombre de faits sont avérés mais qu'ils ne permettent en rien de présupposer de l'avenir et de l'enfermer dans des conclusions fatalistes.

Et il faudrait qu'on s'enlève d ela tête que ceux qui luttent le font pour "un monde meilleur" essentiellement, c'est un peu réducteur et simpliste comme vision des choses. Ces luttes qui sont menées par les associations, les ONG, les humanistes, les altruistes et je ne sais quels hommes qui donnent d'eux-même pour l'amélioration des conditions de vie d'autrui, ces luttes-là visent non pas à réaliser le monde meilleur mais simplement à défendre ce qui distingue l'homme des autres mammifères : la civilisation. Car c'est bien la civilisation qui instaure entre les hommes ces subtiles frontières qui les tiennent à respect les uns des autres et d'eux-mêmes.

Alors si la civilisation doit être synonyme de monde meilleur, alors oui, peut-être que la lutte est celle d 'un monde meilleur, ou tout du moins d'un monde plus tolérant, plus altruiste, plus serein, plus propre à assurer à l'humanité une survie durable. Et c'est en ça que je crois, c'est ça que j'essaye de garde rà l'esprit dans ce que je fais chaque jour, tant bien que mal, parfois plus mal que bien et parfois aussi l'inverse.

Les gens que je vois lutter ne sont pas des rêveurs déconnectés de la réalité, ce sont des personnes qui sont souvent bien plus au fait de la réalité dans sa globalité douloureuse que ceux qui lui tournent le dos de crainte de se trouver amoindri par leurs prises de conscience. Celui qui se penche sur la misère et la panse, la relève, l'instruit de ses droits et devoirs, lui offre un lendemain en offrant une partie du sien, celui-là n'est pas un doux idéaliste qui perd son temps; c'est un homme qui a appris comme il pouvait être enrichissant d'apprendre de celui qui a besoin de tout. Parce que celui qui n'a plus rien, porte sur lui l'habit le plus humble de l'existence : le vécu. Et de ce vécu grave et douloureux on apprend à savoir ce qui pousse les hommes qui ont tout perdu à vouloir demeurer en vie. Et si parfois on en souffre, je sais qu'il arrive aussi qu'on découvre un trésor inestimable : la sagesse qui laisse tout espérer.

La passivité n'est qu'un état de facilité de celui qui ne tente pas d'apprendre ce dont il est capable et qui préfère se cantonner à la certitude de sa propre banalité que de se dépasser pour découvrir les forces qu'il peut déployer; simplement parce qu'il a peur de devoir affronter les conséquences. Mais j'ai toujours trouvé la crainte elle-même plus effrayante que les conséquences de mes actes. Et je n'ai jamais gagné moins que lors de mes périodes d'inactivité indécises et finalement démotivées.

L'avenir est une prise de risque : celui qui ne risque rien se ferme les possibilités d'avenir. Bien sûr les conséquences peuvent parfois faire regretter bien des choses mais je suis certain que les regrets d'avoir fait sont bien moins nombreux que les remords de n'avoir rien fait du tout.

Si je vois ce que j'ai dans ma vie actuelle, je trouve que mes prises de risque m'ont apporté bien des choses et je continue de me fier à cette intuition ...