En fait en relisant mon texte de de matin sur le travail et les commentaires qui s'ensuivent je me donne vraiment l'impression de toucher illégitimement à la sacro-sainte entité du travail, pourvoyeuse d'argent lui-même garrant du bien-être ...

Je pense avoir personnellement suffisamment éprouvé le monde du travail, que ce soit 50 heures dans une chambre froide de nuit plusieurs mois d'affilée ou encore dans des supermarchés à des heures tout aussi matinales, la caisse ou même mon emploi actuel de dactylographe dans une entreprise de conseil en communication aux entreprises. Je pense savoir ce que c'est que de se sentir exploité comme le dernier des tâcherons ou de trimer dur dans des conditions difficiles et je ne considère pas que ces emplois, que ces tâches ingrates m'ont offert d'assumer quelque identité sociale que ce soit. J'ai côtoyé des personnes extrêmement frustrées de leurs conditions de travail, des mères de famille qui après neuf heure debout à une chaîne à 0°C devaient encore faire le ménage, s'occuper des enfants, cuisiner et faires les courses en rentrant après une nuit de travail. J'ai pu me rendre compte via l'intérim ce que signifiait d'être déménageur à 60 heures par semaine et de transporter des armoires métalliques au 5ème étage, se cogner, se tordre quelque chose, se blesser en moyenne une fois par jour; j'ai goûté aussi à la fournaise des cuisines de grands restaurants où on s'ébouillante à longueur de journée les mains au bac de plonge.

Alors, après cela je refuse l'argument selon lequel ces emplois me donnent une position, une existence sociale. Sur le papier oui mais dans les fait on n'est qu'une ombre assujeti au métro-boulot-dodo. On n'est plus qu'un rouage de la mécanique tout juste bonne à vriller sa conscience à un télviseur après une journée de travail.

Souvent je m'entends dire qu'il faut bien travailler pour vivre, c'est vrai mais pas au prix d'une vie, je ne pense pas qu'aucune vie ne valle ce labeur-là, cette abstraction-là.

Alors pour reprendre mon dernier texte, je vais avouer que je me plains pour la forme mais dans le fond je suis infiniment soulagé d'avoir cet emploi à temps partiel qui, s'il ne me donne pas suffisament d'argent à lui seul et m'astreint à quelques économies ayant eu pour conséquences quelques menus ennuis de santé, s'il me fait lever tôt, est pour moi 100 fois enviable à ce que j'ai pu faire avant à des heures plus matinales et dans des conditions réellement éprouvantes. D'autre part mes collègues sont réellement sympathiques, mon travail parfois intéressant en ce qu'il m'apprend bien des choses en économie et qu'il me laisse un temps libre suffisant pour m'aventurer deci delà sur internet. Je ne renâcle pas non plus au travail, je pense faire mon travail du mieux possible même et sans abus de quelque sorte que ce soit.  

On me parle d'argent, je suis d'accord et tant que je serais financièrement dépendant je ne pourrais que concéder qu'il m'est essentiel; mais le plus essentiel n'est pas le sou que je gagne, pas le sou qu'on m'offre très généreusement et spontanément, mais bien ce dans quoi je ressource mes idées, ma vitalité, mes envies, mes passions et ça ça ne s'achète pas, ça ne se vend pas et ça ne se monaye pas ! Si on me le retire, je me défais de tous mes biens et je vais voir ailleurs comme je l'ai déjà fait partiellement une fois je crois ...

Travailler pour survivre mais non pas vivre pour travailler ...

Je suis peut-être parfois soumis moi aussi par ma flemmardise mais je ne me laisserais jamais dériver jusqu'à un point de non-retour, je ne crains pas de travailler dur, au contraire, je l'accepte mais j'accepte difficilement que ma bonne volonté soit arrêtée par des lettres de motivation aussi futiles que déconnectées de toute réalité, je n'accepte pas ces sélections faites sur des critères qui ne correspondent en rien aux compétences recherchées ou requises par l'emploi ! Il y a une dignité que les circuits de l'emploi ne respectent pas souvent et je tiens à ce que la mienne le soit, quitte à me trouver dans une situation inconfortable ensuite.

Je n'apprécie pas le principe de fonctionnement de cette société mais je ne pense pas faire partie de ceux qui la rejettent en vivant à ses dépends : j'en suis les circuits, je me conforme à ses règles dans les limites de ma dignité (j'ai démissioné une fois pour le non-respect de celle-ci et je le referais si besoin) et j'essaye de penser ma contestation comme une acte constructif et non comme une critique acide et sans réponse comme elle est trop souvent énoncée ...

Je n'écris pas pour être reconnu mais tout simplement parce que c'est ça qui affirme mon identité et rien d'autre, parce que c'est ainsi que j'affirme ma place dans cette société et si elle n'est pas tolérée alors je mettrais en oeuvre les moyens nécessaires pour qu'elle le soit !

Avant le travail et l'argent c'est moi-même qui me donne ma place selon les choix que je ferais je pense ...