I'm tyring to remember
Why I was afraid
To be myself and let the
Covers fall away
I guess I never had someone like you
To help me, to help me fit
In my skin

Je me souviens, je l'écoutais en boucle dans le TGV assis sur la banquette entre deux wagons, secoué par les cahots du train, et j'ai regardé sept heures durant le paysage faire un fondu entre les connifères du nord et les palmiers du sud; j'avais le coeur un peu serré, la conscience que je venais de vider mon compte en banque pour prendre un billet sans savoir très bien ce que j'allais trouver au bout ...

Je suis arrivé à Nice, le soleil se couchait, j'ai voulu voir la mer, la grande bleue dans sa robe de soirée. C'était en février et pourtant Nice commençais à se préparer à la saiso chaude avec des gradins impatients d'accueillir les premiers concerts. L'ai était doux, le vent soufflait fort et la ville était bruyant comme seules le sont les villes du sud : de façon chaleureuse et chamarée. J'ai quitté la promenade des anglais et ai posé les pieds sur les sables après trois ans sans voir la mer, j'ai fait quelques pas vers elle, seul sur cette grande plage battue par un vent fort et frais. J'avais ouvert mon manteau pour sentir le vent s'y engouffrer, m'ennivrer de ses douceurs salines.

Je réalisais que je venais de traverser la France pour retrouver celle qui me tenait à coeur, rencontrée sur un clavier, dans un de ces aléas qui font qu'on se retrouve exceptionnellement au même endroit au même moment et qu'on est poussé l'un vers l'autre. Elle voulait partir pour le grand sommeil, je voulais partir pour de grandes aventures alors pour elle je m'en sui créé une petite un beau matin où au lieu d'aller en cours j'ai rejoint la gare et j'ai pris le premier qui se présentait.

La nuit s'était doucement engoufrée dans les rues tandis que celles-ci l'avait habillé d'innombrables lumières; Nice est une merveille au soir, je crois que toutes les villes posées en bord de plage ont cette beauté saisissante quand elles savent comment se parer.

Il était tard quand j'ai pris le dernier train régional qui s'engouffrait dans les sommets alpins pour rejoindre le petit village où j'espérais trouver la fée qui m'avait enchanté par sa voix au téléphone quand elle avait décroché et que derrière la fenêtre de ma chambre d'étudiant se dessinait un bel arc-en-ciel sur ciel orageux à ce moment là; elle y a vu un présage, peut-être en était-ce un mais pas celui qu'on aurait cru ...

Je me suis donc retrouvé à voyager en pleine nuit vers l'inconnu avec de temps à autre une petite lueur dans les montagnes pour me soustraire à l'idée que je ne flottais pas entre terre et ciel. La petite gare était pitoresque et déserte, quai envahi de verdure sur ses bordures, quelques cris d'animaux aux environs pour percer le silence pesant qui m'entourait.

Je crois que je n'avais pas réflêchi jusque là à ce que je ferais alors je suis allé à sa rue avec l'appréhension de l'y croiser par hasard. Le village a quelques siècles et enjambe la rivière qui le traverse avec quelques vieux ponts de pierre. Les ruelles s'entortillent sur les pantes rocheuses avec des passages et escaliers étroitement engoufrés entre les hautes façades.

Je suis arrivé devant sa porte, j'y ai trouvé la porte close, l'heure était tardive alors j'ai simplement glissé ma carte postale sous celle-ci et me suis éloigné vers le porche de l'église avant de lui envoyer un texto pour lui annoncer ma présence non loin si elle souhaitait en profiter.

Je crois que je ne m'imaginais pas alors qu'elle refuserait terrorisée et que je passerais la nuit dans un petit hôtel couteux avant de reprendre mon chemin du retour au matin puis retraverser la France dans un wagon lit à recevoir ses excuses sur mon petit écran lumineux tandis qu'Avril Lavigne continuait à chanter ...

Je ne l'ai jamais vu, on s'est perdu de vue peu à peu durant l'année qui a suivi et de temps à autre je lui laisse un petit mot pour me réjouir que depuis ce jour elle ait choisi de reprendre sa vie en main et qu'à présent elle se dit comblée par la vie ...

J'avais envie de raconter cette histoire ce soir pour me rappeler que je suis ça aussi, cette démesure déraisonnable qui demeure là aux aguets, pour être certain que demain encore je serais prêt à tout donner pour ce qui m'importe ...

Sinon que serait la vie si on n'y mettait pas ce grain de folie ? Que serait-elle si on laissait les années nous assagir, nous mettre dans un sarcophage de raison ? Pas celle à laquelle j'aspire c'est certain ...